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Mes virées, mes carnets...Bienvenue chez moi. C'est-à-dire nulle part.

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21 mars 2005 1 21 /03 /mars /2005 12:57
Les amis, je la ferai courte, mais bonne j'espère.
 
Je suis donc bien arrivé à La Paz, 3471m d'après l¡altimètre de Jan, frère d'Allan, que j'ai pas fini de remercier.
Je peux  donc vous confirmer que oui, vingt dieux, on la sent, l'altitude. Bon, pas tant que ca non plus, je vis quand même à 2200m depuis septembre, hein... Mais voilà, ici, quand une rue monte, elle monte. Pour de vrai. Et quand vous la remontez, sac de jute bleu au dos (contenant tente, réchaud, popote, matelas, GAAAAAAAAAS, fraîchement loués à des gens formidables, qui vous conseillent sur la route à prendre e ttout et tout, et qui n'ouvrent pas de grands yeux quand vous leur dites que vous partez solito), et cartes fraîchement  achetées à l'Instituto Geographico Militar (ça rigole pas avec la topographie, nom de Dieu! Bon, dans le lot, y  a une photocopie, l'original étant en rupture de stock), ça monte vraiment  (avec toutes ces parenthèses, j'avoue que moi-même, je me demande ce que je raconte...)!
 
Bien arrivé donc, au pays dees femmes en chignon et chapeau presque melon sur la tête, et de la flûte de pan. Quand vous dévoucrez la Bolivie en arrivant à 6 heures du matin, déchenillé de fatigue, vous voyez uun truc : l'Illimani. Trois pics qui semblent des  nuées, avant de se convertir, au fil de la descente, en monument dee glace et de roche. 6400m et des poussières.  Et pas loin, le...le...le... ah, le nom m'échappe, mais c'est pire, c'est à dire mieux. Je rassure, je ne vais que PRÈS dudit Illimani. Une promenade.
 
Avant le programme détaillé, La Paz, enfin ce que j'en ai vu. Quand vous sortez de l'aéroport de  l'Alto (bien nommé, à plus de 3000m d'altitude), vous entrez rrapidement dans la réalité qui fait mal: on dort dansles rues (mais ça, ça arrive en France aussi, alors n'allons pas s'effaroucher non plus), et les constructions pauvres sont vraiment pauvres. La misère féroce, qui ne vous laisse pas de marge relativiste. Ici on est pauvre, et pour de vrai. On ne vend pas de tout et de rien, on le mendie. Les constructions sont en style "pas fini", et le resteront apparemment.  Autant dire qu'au début, même en venant de Mexico, chers européens qui me lisez, on demeure un peu estomaqué.  Bon, je le savais, hein, mais c'est toujours différent en vrai, qu'on dit.
D'après mon chauffeur de taxi, la situation politique s'améliore, et, je cite "vous pourrez vous promener dans les montagnes tranquillement". Youpi... 
La Paz, au centre, c'est aussi et quand même de l'histoire bien présente et bien massive, sous forme de cathédrales, monuments et grandes rues avec demeures de style colonial indéterminables d'âge. Mais bon, ,je vous dis, je suis là depuis une poignée d'heures, alors à part Javier, je ne connais pas encore grand chose.
Qui est Javier? Aaaaaah, vous saviez bien qu'il y avait déja de l'incroyable à raconter. Javier parle.  Je pense qu'il entend, mais en tout  cas il parle. C'est le seul de l'hôtel Morumbi, jusque là. Non, vous ne rêvez pas. Je suis dans un hôtel de muets. Ils vont et viennent, lavent et bricolent, indiquent le fonctionnement de la télécommande de la télé (immédiatement éteinte par mes soins), et vous saluent avec le sourire. Par contre, c'est pas des bavards... Je n'irai pas jusqu'à dire pour autant que l'endroit est calme : On a beau être muet, on n'en demeure pas moins humain, donc bruyant.
Pas croire non plus que ma sieste d'arrivée allait se dérouler dans le silence de la mer.
 
Allez, le programme, maintenant.
Je vais donc commencer par le petit village de Tres Rios, avant de foncer vers la mine abandonnée de Siberia, entre l'Illimani et le Mururata,  un beau bébé lui aussi . Ensuite, direction Lambate, Chuñavi , Khala Ciudad et Chulumani. D'après mes amis loueurs, y en aurait pour une semaine ferme. Ça me va, tonnerre de chien. On me dit qu'il peut pleuvoir une heure par jour, peu me chaut, je suis préparé pour ça . L'altitude va se soigner au maté de coca (pas cola), le matériel est pratiquement rassemblé. Ah oui, faut acheter à manger, aussi...
Mais à part ces détails, j'y suis les amis, j'y suis. Les visages pâles commencent à se faire rares, bon débarras, les enfants hurleurs de l'avion ne me manquent pas, et quant à moi, je me sens en pleine forme pour en découdre. Car il y aura confrontation, soyons réalistes. La nature, la montagne, tout ça se gère, , s'apprivoise, se prépare . Je ne suis pas superstitieux, et pas si mystique que je n'ai pas avec moi la volonté sauvage de confronter aussi mon savoir, ma technique et mes petites forces à cette histoire-là. On verra bien ce qui reviendra de là-bas dans une semaine et quelques, mais ça sera différent, comme j'ai dit. Peut-être pas plus mal que maintenant, d'ailleurs. De totues façons, j'en ai trop parlé, maintenant, il faut y aller.
 
C'est d'ailleurs ce que je vais faire, à présent. Je pense redonner signe de vie avant le retour à Mexico, mais dans le doute, je maintiens mes consignes de non-inquiétude avant le 04/04 .
 
Je vais bien, je vous embrasse ou vous serre les pognes selon les cas, et vous laisse là.
 
À bientôt, joyeux camarades, amis, famille et les autres.
 
Raph
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20 mars 2005 7 20 /03 /mars /2005 19:33

11h04, Mexico, D.F.

 

Derniers préparatifs. Tout semble OK. Reste à acheter à La Paz : Tente-matelas-réchaud-bâtons-bouffe-machette. Allons-y!

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31 janvier 2005 1 31 /01 /janvier /2005 09:32

Maricarmen, suite et fin.

Souvenez-vous, Maricarmen, c'était la Duegna, la proprio affligeante que je me tartinais depuis début octobre. Le genre hystérique, forcément. Les crucifix sur les murs, et tout le tremblement. Le règlement directement inspiré de celui d'un pensionnat de jeunes filles, le mur à faire en moins.
Oh, bien sûr, pour quelques mois, ça pouvait se supporter. Mais que vouleez-vous, l'idée de payer moins pour avoir plus ne me déplaisait décidément pas.
Je décidai donc de mettre les voiles. Il le fallait. Pouvoir recevoir, tout le temps qu'on veut, qui on veut, et pour les motifs qu'on veut, voyez-vous, ça n'a pas de prix, pas même celui d'une caution naufragée dans l'opération.

Car j'anticipe! Le départ aurait dû se faire début avril, histoire de récupérer les trois sous que la créature se gardait en guise de garantie de mon respect de sa maison, de ses intallations, de ses moeurs (forcément bonnes...), de la morale, de la satanée "convivance" , que je méprisai bien sûr quotidiennement en m'exprimant aussi souvent que possible par monosyllabes, c'est très efficace, surtout quand la duègne s'entête à vous raconter les déceptions amoureuses qu'elle enquille sur Internet.
Mon avis, chère Maricarmen? Tu les fais fuir par ton charme si, comment dire, si.... particulier... mélange de sangsue et de larve de dytique (plus du tout sûr de l'orthographe, lo siento...).

Un beau jour, la vieille (pas vieille en réalité, perdue quelque part entre une cinquantaine pas triomphante et les années cinquante dont elle aurait sans doute voulu voir le retour triomphant) me demanda pourquoi ses locataires ne restaient pas. Ben oui, tiens, pourquoi? Un endroit où l'on paye cher, où l'on ne peut que recevoir des appels téléphoniques et pas en passer, où un membre de la famille doit être présent en cas de visite ( et pourquoi pas un chaperon, et pourquoi pas un chapelain), où un épouvantail (madame soeur) surgit parfois de nulle part, de l'ombre de préférence, pour vous sourire avec une dent sur trois et vous répéter le mantra familial (ce qui compte, c'est que tu te sentes bien ici, ce qui compte c'est que tu te sentes bien ici, ce qui compte...), bref, pourquoi ne pas rester? Je ne me
souviens plus de ma réponse.

Vous vous souvenez peut-être de sa descente de mâchoire lorsque je l'avais coupée ("tu comprends, j'ai des règles dans cette maison, c'est pour le respect de tous, c'est pour que tu te sentes bien ici, (AAAAAAAHHH!!!!!!), en lui lançant que si je me trouvais en contravention avec ses règles, je partirais. Ah elle n'y croyait pas! Le sacro-saint pouvoir d'un mois de caution!

Un beau soir de la semaine dernière, je lui annonçai. Fallait bien y aller. J'étais là, encore embrumé d'un formidable cours d'élèves avancés, à grignoter une chose ou une autre, quand j'entends les pas étouffés (par d'épouvantables pantoufles géantes, supposées faisant jeune). Bien, bon, allez, me dis-je, finissons-en, et allons nous coucher avec la satisfaction du devoir accompli. Je me retourne et la
vois. Je passe sur le jogging informe, je suppose qu'avec les pantoufles, c'était supposé me donner envie de rester, tant l'ambiance était familiale. Au sommet de tout ça, il y avait un chapeau. Oui oui oui, vous avez bien lu. Un de ces machins en laine qui peuvent vous ridiculiser autant par temps chaud que par temps froid, c'est quand même pratique, un chapeau toute saison. Un chapeau. Chez elle. A neuf heures du soir. Oh bon sang... me dis-je. C'était le moment de clouer les derniers clous du cercueil. Je le fis. Ce fut drôle. elle lança une conversation passionnante
(et gnagnagna, et como estas, et ton travail, et ce qui compte c'est que tu te sentes bien ici (AH AH AAAAAAH! Tu ne sais pas encore ce qui t'attends, vieille bête!)), que je finis par interrompre pour lui lâcher sur les pieds que je me barrais.

Moment de délice, suspendu dans le temps, saveur de cette mâchoire qui s'affaisse et se contracte (elle avait d'ailleurs un tic épouvantable et sans doute douloureux (je l'espère), qui lui faisait avancer la mâchoire bien au-delà du raisonnable, ce qui donnait une curieuse sensation de ponctuation du discours par une expression pré-néanderthalienne), de ce regard qui se voile, fini la convivance, bonjour le comptage des sous, ah mais attention hein, fini les papouilles. Je vis donc son vrai visage, celui qu'elle avait du mal à dissimuler de toutes façons, quand elle me refusait l'utilisation de la machine à laver ou du téléphone pour des raisons d'une pingrerie indigne du pognon que je lui versais mensuellement.

Cette petite jouissance se réitéra quelques jours plus tard, quand elle m'apprit qu'un autre des trois locataires allait faire sa valise...

Un beau jour, j'avais découvert une chose morte flottant dans une cuvette d'eau. C'était sa perruque...

Elle m'apprit aussi qu'elle risquait de perdre son travail. Je feignis à merveille le tremblement du menton de compassion. Puis je ricanai de plus belle.

Deux fois la semaine (DEUX!!!!!), je devais subir l'intrusion de sa "muchacha", c'est à dire une brave dame venant "faire le ménage", en dégageant sans trop de ménagement les divers objets qui n'étaient pas "à leur place". je sais, je sais, ceux qui me connaissent gloussent déja de mon légendaire manque d'ordre. Oui mais quand même: mon bureau était laissé impeccable, c'est à dire que la brave fille (une sorte de brillant incrusté dans une incisive, de quoi glapir d'effroi) se chargeait pour moi de mettre en ordre toutes ces paperasses, ces machins avec écrit dessus des choses incompréhensibles, comme "thèse, première partie", ou "article numéro tant"... Ou, pourquoi pas, "ranger" mon ordinateur... Et pour la salle de bains, quoi de plus logique que d'en transvaser le contenu, deux fois la semaine donc, sur...mon bureau! Que faire d'un rasoir pour lire? Sauf si c'est une lecture barbante, je vous l'accorde.

Bon, c'est bien long tout ça. Alors je résume: j'ai déménagé. Pas bien loin. Et emménagé, chez une Argentine (qui, forcément, dit pis que pendre de tout ce qui est Mexicain, c'est la loi du genre, après tout si j'emménageais avec un Anglais, je vous raconte pas) de ma connaissance, maquilleuse de son métier, qui, notamment, vient de décrocher un contrat avec Playboy.
Ah quand je vous dis que les temps vont changer!

Et pour clôre le tout, voici donc l'adresse où me débusquer: Calle Amores (si si si!) 946, Appartement 19, Colonia Del Valle, Delegacion Benito Juarez, Code postal inconnu, Mexico D.F.. Mais si vous avez à m'envoyer des colis piégés, ou même des pas piégés, envoyez plutôt à l'Alliance, l'adresse est disponible sur demande, là je vous le donnais pour le nom de la rue, on n'habite quand même pas rue des Amours tous les jours, hein?

Et, cerise sur le gâteau, on peut m'appeler sans problème au numéro suivant: 55598742. Bon, il faut un  code avant, pour pouvoir appeler au Mexique. Et je conseille à ceux qui tenteraient l'aventure téléphonique de s'acheter une de ces cartes prépayées qui vous économiseront d'abominables surprises sur facture. Et je conseille aussi de tenir compte du décalage horaire! (moins sept heures...) 
Allez, bises pour tout le monde, et que Maricarmen finisse là où elle le mérite: au Diable.

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17 janvier 2005 1 17 /01 /janvier /2005 09:27

Ok, vous aviez perdu l'habitude de recevoir TANT de nouvelles de votre serviteur. Mais quand il se passe un p'tit truc, ou deux, autant en faire profiter les copains et la famille et tout et tout.

Comme certains ne l'ignoraient pas, je recevais la visite la semaine dernière de deux mètres de cousin franco-américain, un p'tit gars plutôt redoutable, français avec les Français, américain avec les Américains, et même, je pus le constater, argentin avec les Argentins.

Pour clore et conclure une semaine de tequila, de franche rigolade, de bons mots plus ou moins subtils, d'anecdotes effarantes et autres échanges de secrets liés à la Défense Nationale de nos pays respectifs (ne vous inquiétez pas, j'ai divulgué uniquement le plan détaillé de la Ligne Maginot), ledit cousin proposa une promenade, c'est-à-dire une randonnée sur la Malinche. A l'origine, la Malinche est le nom donné à l'indienne qui fut la traductrice, puis l'épouse locale de Cortes, le conquérant de l'Amérique Latine, mais je sens que je vous ennuie déja, je vous renvoie donc à vos livres d'histoire pour plus d'informations.

Bon, nous ne sommes donc pas montés sur la dame, plus en état depuis belle lurette, mais sur une montagne, donc un volcan, par ici, forcément, qui porte son nom.

Un peu instruit par mon expérience précédente sur l'Iztaccihuatl (cf. épisodes précédents), cette fois, nous prîmes un pull, on a beau avoir une réputation d'"athermique", on peut très bien vivre sans pneumonie.

Qu'en dire, qu'en raconter? Raaaaaaah que c'est beau, d'abord. On finit à 4300m, et avec un panoramique 360 degrés sur la région, qui permet de voir le Popocatepetl et l'Iztaccihuatl (vous y arrivez, côté prononciation?), et même le vrai point culminant, le Pico de Orizaba.
Et Aaaah que c'était bon de marcher entre frangins, à suivre tant que possible la foulée McKay (le petit tient de son papa, j'ai beau avoir du souffle, deux pas de Raphaël = un pas de Roland, faites le calcul des calories dépensées par chacun, divisez le tout par le nombre de  tacos ingérés durant la semaine et ramenez tout sur dix, après multiplication par le nombre d'âneries débitées par les deux, vous obtiendrez mon âge ou le sien). Le gaillard fut initié à nouveau à l'escalade sur la fin, une belle petite pointe de rocaille servie fraîche sur lit de crête relativement vertigineuse. 
Pourquoi je vous raconte tout ça? Pour l'écume aux lèvres de certains, envieux et cloués au sol picard ou d'ailleurs, rageant et pestant contre "l'éternel estivant" (ça c'est de Brassens, je ne suis pas si fort). Ensuite pour insérer une nouvelle petite tirade garnie d'invectives aigries. Ah, ne protestez pas, je sais que vous adorez me voir m'énerver. 
Flash-back: il est cinq heures du matin le même jour, et j'attends le cousin devant son hôtel (le même que celui que j'occupais lors de ma première visite mexicaine, souvenez-vous, les plus anciens de la liste) dans un taxi. Un BON taxi, j'insiste sur ce point, le genre de taxis qu'on appelle, qui répond présent bien poliment et vous appelle señor et pas joven (jeune, ou jeune homme, ce qui, malgré la normalité de la formule, continue de me gonfler la condescendance supportée comme vous n'imaginez pas (en fait, si, ceux qui me connaissent savent à quel point ça peut me rendre grincheux)). Un de ces bons gars de taxistes qui vous causent de la pluie et du beau temps, qui vous demandent d'où vous venez, et ce que vous pensez du Mexique (toujours répondre que c'est formidable et merveilleux, la question est purement formelle et la réponse automatique). Le genre de type qui ne voit aucun inconvénient à attendre avec vous un cousin qui n'est même pas le sien, une bonne
demi-plombe, aucun problème. Et pour que vous ne loupiez pas votre cousin, il vous suggère même d'aller vérifier que le grand type qui vient de sortir, là, ce ne serait pas lui, des fois.
Un gars prévenant et tout et tout. Oui, vous pouvez sortir et vérifier. Et afin de ne pas vous alourdir démesurément, il vous soulagera également du surpoids occasionné par votre carte de crédit et de trois cent pesos en billets. Le coeur sur la main, je vous dis. Sauf que c'est le vôtre!
Rah le salopard. Je me disais bien, quelques dizaines de minutes plus tard, qu'il était bien calme, à l'heure de payer, quand je fouillais mes poches en maudissant mon désordre habituel pour avoir oublier fric et carte (à lire à haute voix pour l'effet
sonore).
Je sais je sais, ils ne sont pas tous comme ça, au Mexique ou ailleurs, prenez le gars qui m'offrit il y a peu une antique pièce de cinquante pesos pour me porter chance ou célébrer l'amitié franco-mexicaine, la larme au coin de la paupière en repensant à la correspondante française qu'il avait épistolairement abandonné lors de son mariage. Un type bien.  Je ne généralise pas. Je dis simplement que décidément, volé au Mexique, escroqué en France (Vu le prix de la course, le chauffeur de taxi français peut prendre sa retraite à trente ans aux Seychelles (encore que je préfèrerais qu'il choisisse Phûket!)), il faut se rendre à l'évidence: c'est une profession de margoulins et de coupe-jarrets! Un peu comme les huissiers, notaires et autres assureurs, mais je ne vais pas m'étaler plus, c'est lundi, et en plus la conclusion est plutôt drôle: après opposition faite sur ma carte, dénonciation du tire-laine auprès de ses chefs (faut-il être nigaud pour voler les clients quand on peut vous tracer sans le moindre problème...
Je lui souhaite bien du plaisir dans la cellule où il finira par atterrir. Il pourra toujours demander à ses "protecteurs" chaleureux et très "contact humain" s'ils aiment le Mexique.), après tout cela donc, mais sans appeler la police pour l'instant, inutile d'ajouter les ennuis aux problèmes, j'ai pu constater que le corniaud, peut-être trop confiant, n'a pas souhaité profiter des milliers de pesos couvés sur mon compte. En clair je n'ai perdu que les trois talbins qu'il m'a subtilisé, le bougre, et j'en suis seulement d'une carte de crédit, rira bien qui rira le dernier cabròn, que mon pognon t'étouffe.

Et en plus j'ai pris des coups de soleil.

A bientôt chers amis, ne prenez pas le taxi, quel que soit le pays dans lequel vous vous trouvez, faites vôtre le proverbe des Mexicains du Nord en le modifiant: "on ne doit tuer personne sauf les chauffeurs de taxi" (eux disent que c'est les gringos qu'on peut tuer, le principe est inchangé).

Mes excuses aux éventuels chauffeurs de taxi qui recevront ce récit incohérent. Mes amitiés aux autres.

Raph.

PS: pas aujourd'hui, mais peut-être demain, ceux qui le désirent recevront quelques photos de l'équipée.

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10 janvier 2005 1 10 /01 /janvier /2005 09:19

Allez, c'est le début de l'année, je prends de bonnes résolutions. Finis les persiflages, finie la mauvaise humeur, la grogne et les haussements d'épaules accompagnés de vigoureux "ha!" qui veulent dire autant de "peuh!". Je serai bon, bienveillant, ouvert à tout, patient, en harmonie avec le monde, qui ne va d'ailleurs pas si mal, et j'accepterai tout avec un grand sourire.

Bon, d'accord, je commence mal, puisque je mens.

Je ne pourrais de toutes façons pas renoncer à presque trois décennies de grognements sceptiques, alors autant commencer par un de mes nouveaux ennemis préférés, j'ai nommé l'Empire, celui de George DoubleFuckYou Bush (copyright de cette expression à mon ami Christophe Bony, qu'il soit béni dans les
îles.). Bah, un peu cliché tout ça, me direz-vous.
Peut-être, mais là j'en ai vécu un peu des coulisses, alors je vais vous faire partager, ça ne vous instruira pas forc´ément des masses, mais ça me soulagera.

D'abord, je n'ai rien contre les Américains. J'ai d'ailleurs de la famille américaine, j'éviterai donc la schyzophrénie des propos. Ça va plus loin: j'écoute une quantité majoritaire de musique américaine et anglo-saxonne, comme tous le monde, peut-être plus, et je consomme BEAUCOUP PLUS de cinéma hollywoodien que de cinéma des studios de Boulogne-Billancourt, qui à ma connaissance n'y sont d'ailleurs plus, mais la raison en est tout simplement que sacrénom d'une pipe en os, y a des trucs qu'ils font mieux que nous, faut le reconnaître, d'ailleurs, quand ils font un film sur les hésitations fébriles d'un jeune étudiant de première année de prépa à Lakanal, lira-t-il Proust ou Gide, couchera ou couchera-t-il pas avec sa voisine, étudiante en ethnologie, hein, bon, ben dans ces cas-là les Ricains se ridiculisent, Bruce Willis n'a pas le charisme de Melvil Poupaud pour le frémissement du genou de Claire, mais je m'égare et je m'embrouille.

Pourquoi râlé-je?

Mes préjugés nombreux, à l'aube d'un voyage via le Texas, se confirmèrent-ils? Vous-écris-je alors que ma valise, encore perdue, tarde à rejoindre son seigneur
et maître? Ai-je dû me farcir des contrôles d'identités à répétition, des fouilles au corps, des détecteurs pas croyables, pour finalement louper consciencieusement ma correpondance et rentrer chez moi avec de loooongues heures de retard?

Eh bien oui. Et même plus encore. Arh, mais tout ça on le sait, me dites-vous, et on te le disait bien, me rappelez-vous. Et vous avez raison, amis lointains.

J'enrage, voyez vous. J'enrage d'avoir testé le coup quand même. D'avoir vu les murs de l'aéroport tapissés de reproductions de formulaires d'immigration bien remplis (patronymes anglo-saxons, nationalités américaine et anglaise) et mal rempli (la même chose mais avec des patronymes et nationalités françaises...). J'enfume d'avoir subi la reprise de mes empreintes, puis de ma photo, pour qu'une
douanière d'âge dépassé et de poids inspirant la crainte à tout terroriste normalement constitué, me signale d'un air suspicieux que mes yeux n'ont pas la même couleur que sur ma photo.  J'en peste (notez l'espacement et l'orthographe, et ne perdez pas de temps en mails moqueurs) d'avoir dû ouvrir ma valise sans arrêt, promettant solennellement que son contenu ne présentait aucun danger (remplie de livres... couillons que vous êtes, c'est bien pire que des quintaux de TNT...), d'avoir eu à subir ces humiliations avec le sourire de peur qu'une adolescente en uniforme XXXL me fasse engeôler pour suspicion de transport d'un cerveau non homologué...
Et tout ça pour subir l'inefficacité totale d'une prétentieuse compagnie US, Continental (je donne le nom dans votre propre intérêt)...

Et tant qu'on y est, il me reste quelques balles dans le chargeur pour tirer sur les collabos: les français (pas de majuscule pour ces salauds-là) qui acceptent d'ouvrir les valises et de contrôler trois fois plus les identités, sur ordre des Néanderthaliens
apparemment joyeux de revenir au bases de la Guerre Froide, et ceux qui adoptent le même ton de politesse menaçante pour ce faire que leurs employeurs. Ces saligauds qui haussent les épaules quant vous leur signalez qu'avec tout ça, il n'y a jamais eu d'espoir que votre vol se déroule en temps et en heure. Et je garde même quelques pruneaux pour les Chicanos chicaneurs des douanes, ces Mexicains affublés du même uniforme de la honte de l'Amérique, qui regardent d'un sale oeil leurs compatriotes d'hier, et les menacent directement, dans un anglais encore teinté de jus d'agave.

Sale boulot que tout cela, motivé et remotivé par des campagnes d'affichage coincées entre Orwell et le réalisme socialiste (quoiqu'à mon avis, les censeurs de Staline auraient sûrement repoussé certains posters en les jugeant outranciers.), on surprend le futur tortionnaire convaincu de faire son boulot (Je n'exagère pas: c'est pas de la torture, ce petit jeu malsain de vous vendre un billet, puis de vous humilier à chaque étape du voyage en vous souhaitant de vous revoir bientôt???), à la pause, en train d'écouter son walkman comme tout un chacun...

Allez, une dernière, je vous la soumets histoire de finir en eau de boudin.
Vu à Houston: le douanier et les mangues.  Une Mexicaine (plutôt Chicana, c'est à dire vivant aux USA), du genre qui parle en anglais à ses enfants, suscite l'intérêt du petit clébard renifleur promené par une moustache. Elle trouve ça rigolo, et ses mouflets aussi, pensez donc. Les mioches avancent une main, c'est un de ces petits toutous de chasse qu'on s'offre sous le sapin, avec des oreilles, et une bonne
tronche. La moustache, un de ces bons gars de la campagne texane, dit aux mioches qu'ils ont "besoin de reculer". Je sais que c'est une formulation normale, mais je ne m'y fais pas, elle sent pas la viande fraîche et franche. Et la dame qui dit au petit clébard qui remue la queue qu'il va quand même pas lui manger ses mangues, hein? Ce qu'elle ne pige pas, c'est que le boulot du remueur de queue est terminé, et que celui de la moustache vient de commencer. Il veut voir le sac, il lui demande donc, sur ce ton neutre et pourtant pas rassurant, 100% protocolaire, règlementaire comme une sommation avant tir pour tuer, de décrire le contenu du sac, puis de le montrer, puis d'expliquer l'utilisation.
Il s'agissait de quatre mangues de fort belle taille, du vrai produit de chez nous, enfin de chez eux. Déjà, c'est risqué, dans un pays où l'ennemi est l'escargot transporté illégalement dans vos bagages. Moi, je le sentais bien venir, que les mangues ne mettraient pas le pied sur le territoire.
Une, apparemment, la p'tite dame l'aurait emmenée, mais quatre...
Je résume, l'épisode ayant duré un bon quart d'heure, mais tandis que la dame commençait à manger les mangues sous l'oeil chassieux de la moustache, elle répétait qu'elle allait se les goinfrer toute seule, et pas en faire un juteux trafic (elle est pas mal, celle-là, hein, pour un lundi?). Et la moustache de dire, dans cet anglais inimitable à l'écrit (en gros, parlez anglais en mâchant votre moustache), "eh bien, la chose est, "Maame", je ne vous vois pas manger toutes ces mangues... Alors vous avez besoin de reculer de deux pas, et de me remettre ces mangues." Ce qu'elle fit. Je surpris la moustache refilant un susucre autorisé au petit clebs, que je rangeai illico dans la catégorie des collabos...

Bon, allez, pour une rentrée c'est pas mal, Viva Mejico, hein, et à la prochaine.

Raph.

PS: A tous ceux que j'ai vu pendant ces vacances, merci de la chaleur de votre amitié, en condensé comme ça, j'en ai pour un moment à digérer les bons moments passés avec vous.
A ceux que j'ai rencontré pour l'occasion, merci aussi, ce n'étaient que des premières fois annonciatrices d'agréables piqûres de rappel.
A ceux que je n'ai pas vu, faute de temps ou autre, ce n'est que partie remise, Sachez que mon envie de vous revoir n'en sera qu'augmentée.
Mes excuses à ceux que je n'ai pas prévenus de ce retour, je vous paierai une tournée supplémentaire, et n'avancerai que les pires excuses pour me justifier (emploi du temps de vacances très chargé, et les mille et une choses qui transforment deux semaines en cinq minutes). J'embrasse tout le monde quand même, sans distinction.

PS2: Oui, au fait, cet avis tient lieu de communiqué, enfin vous aurez compris que je suis bien rentré...

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12 décembre 2004 7 12 /12 /décembre /2004 00:30

Juste avant la Noël, voici mon petit bulletin irrégulier. Ah, vous croyiez peut-être que le Mexique avait fini par me digérer, que je m’étais peu à peu rassis, rasséréné et rassasié de tacos, de tequila et de bière citronnée? La gueule tannée, assoupi. De
jeunes Mexicaines au sourire ensorceleur achevant de m’ensiréniser et de me laisser, Ulysse échoué, sur le rivage crasseux d’un trottoir de la capitale?

Eh bien non. Répondant à l’appel du devoir, mais aussi à celui de la gloire et de l’égolâtrie la moins avouables, je passai au-dessus de la tête de nombre d’entre vous, il y a un peu plus d’une semaine. L’Allemagne me réclamait, ou du moins me lançait, par-dessus l’Atlantique, de grands signes de l’aile, et comme ceux qui me connaissent le savent bien, je ne sais pas dire non.

On m’avait donc proposé de quitter ma retraite studieuse mexicaine pour me congeler et converser au sein protecteur d’un château fin dix-neuvième, converser donc, de l’un de mes sujets de prédilection: le polar, sa vie, sa vitalité. Et on ne me proposait rien moins que d’animer un débat sur le national-socialisme et sa représentation, au milieu d’un plateau composé de Français, d’Allemands et de Polonais. Ca allait donner mes amis, on allait voir ce qu’on allait voir. Je ne vous assommerai pourtant pas du récit dudit colloque en lui-même, cela sera fait en temps et en heure sur Arts Sombres.

En revanche, je vous ennuierai aujourd’hui de mille et une remarques qui viennent à l’esprit de l’Européen qui retrouve la mère patrie européenne pendant quelques jours, après un premier exil de trois mois. 


Résumons les épisodes précédents pour ceux qui nous rejoignent: muni d’un baluchon et de mon fidèle AK-47, je partis, les poings dans mes poches crevées, là où le vent devait me porter, c’est à dire assez loin de l’ombre plus vraiment protectrice des Assedics de France, pour un pays où des hordes d’élèves me poseraient sans fin les questions rituelles: pourquoi es-tu venu au Mexique? Qu’est-ce que tu penses du Mexique? Tu as une copine?, et le tout pour un confortable salaire de 500€ bien tassés. 
Arrivé fin août, mon été ne s’était donc pas achevé, et je pouvais glousser méchamment en voyant les natifs porter gants, bonnets et écharpes dès que la température descendait sous les 18 degrés Celsius. Je ne tardai d’ailleurs pas à me retrouver prisonnier de ma propre bravacherie, puisque les collègues de toutes
origines notant mon obstination au port de la sandale et de la chemisette, je me retrouvai contraint à ne pas faire mentir la légende naissante, et forcé de friser l’engelure lorsque la température se hasardait sous les dix degrés. C’est tant pis pour moi, la légende est à ce prix. Et puis, tous ces orteils sont-ils vraiment nécessaires?
Bon, cette fois, l’Allemagne, ça allait être du sérieux. La fin d’automne au pays de Franz Biberkopf, (quand lirez-vous tous Berlin Alexanderplatz???), ce n’est pas pour les muchachos, il allait falloir réintégrer chaussettes (mes pieds, cher Oedipe,
auraient-ils enflé autant que mes chevilles? Pris au moins trois tailles!) et chaussures, et même costume, parce que dans un pays où on s’intitule “professeur”
ou “docteur”, il ne s’agirait quand même pas de se promener en t-shirt de heavy metal. Quoique... 
Abandonnant quand même le pull pour pouvoir voyager léger, je partis donc.

D’abord, c’est très loin, l’Europe, savez-vous? Très.
Plus encore que je ne m’en souvenais: L’arrivée à Heathrow, goddamn aéroport terne, me doucha vite fait, car en fait d’Européens, je tombai, nez cassé, sur des
Anglais. Plein. Des tas d’Anglais. Déja que certains malotrus mexicains m’offensent régulièrement en me causant l’angliche, mais là... Que de l’Anglais à
parler, donc. Pas bien drôle. Les anglais encore moins. Peut-être plus hautains encore que ces nigauds d’américains qui, occasionnellement, me toisent, moi le traître de Français qui n’a pas le cran d’aller mourir pour du pétrole, oui, mais de mort lente... Ne croyez pas que je préjuge à répétition, tout ça c’est du vécu avec un grand V, bon nombre d’Américains semblent vraiment manger des Freedom Fries, les niais.

Alors les anglais, donc. Pas bonne impression. Je n’avais pas mis les pieds sur l’île depuis presque quinze ans (savez vous qu’on devient vieux quand on peut dire des trucs comme “ça fait quinze ans” et en avoir le souvenir frais?), j’en avais gardé un bon souvenir, à base de petits sandwiches triangulaires au concombre, dégustés sur un ferry tanguant pendant que mes camarades de classes verdissaient à vue d’oeil, bien fait, ce n’était pas des camarades. L’Angleterre de mes souvenirs était un pays pas plus froid ni pluvieux que ma saloperie de Picardie marécageuse, avec des gens pas plus rougeauds que moi-même, qui mangeaient du poissont frit et des frites molles avec un enthousiasme aussi sympathique que leurs châteaux étaient propres et en flammes (Eh oui, Windsor, remember...).
Ben cette fois j’ai pas aimé. Que voulez-vous? Le business man moyen, celui qui, tout en coudes et en gras, veut vraiment votre accoudoir pour s’y vautrer en rédigeant son e-mail mesquin (cher Allan, qui que vous soyez, il semble que vous vous approchiez plus de la porte que de l’augmentation), siroter un verre de blanc en guise de quatre-heures, et se foutre vigoureusement des consignes qui suggèrent, pour la santé, la sécurité et le futur de tous, d’éteindre ce satané ordinateur portable au moment de l’aterrissage...
Un business-man ne fait pas le briton, me direz-vous.
Ah mais c’est que l’exception anglaise, c’est aussi fait de petits riens qui énervent, comme de vous inonder de leur monnaie de singe en guise de retour sur un billet de 20 €, le tout pour un paquet de biscuits. Ces deux pièces qui trônent sur ma table, m’irritent chaque jour...

Bon, je suis donc à Heathrow , là, le fameux airport, où j’ai une poignée d’heures à tuer avant d’embarquer pour Berlin. Je m’ennuie à cent sous de l’heure, j’ai déjà fini mon polar ou peu s’en faut, je relis des communications pour le colloque, je bricole des questions. Je regarde autour de moi. Je ne vois que des Anglais, quelques Allemands peu à peu.
Sautons en avant de quelques heures. Je suis maintenant à l’aéroport de Berlin Tegel, à attendre un comité d’accueil venu trop tôt, revenu trop tard, que je louperai finalement complètement. Voilà-t-y pas que je dois parler. Mais vraiment parler. A des hôtesses, des chauffeurs de taxi. Plus tard, à l’aimable tenancier de nuit d’une auberge de jeunesse. A la serveuse charmante qui m’apportera une tranche de foie
dans une sauce savoureuse à en pleurer, avec purée de pommes de terre et pommes au four, raaaaaaaah si vous saviez l’effet que ça fait, une tranche de foie
saignante dans une assiette au coeur de la nuit du quartier Charlottenburg, quartier de gare, donc de bars louches, à putes si vous préférez, appelons les choses par leur nom, mais je m’égare.

Et donc, je parle. Ah, mais quoi? Quelle langue? Quel idiome privilégier? Le Français que bon nombre souhaite parler? L’Anglais, le cochon d’Anglais que je n’aime finalement que dans les films, si ça continue comme ça? Eh bien non, je prends mon courage à deux mains, et mon orgueil entre les dents, après tout j’ai repris l’Assimil pour défaire et enfin refaire ce que les pathétiques profs de misère ont fait semblant de m’inculquer SEPT ANS DURANT (mes élèves actuels, en un tel laps de temps, finissent bilingues. Prof, où est ta victoire?), bref, je me lance dans la langue de Goethe. Plus précisément, j’ai pour la première fois de ma vie des conversations qui dépassent les deux phrases. Et je m’en sors. Je balbutie, je tâtonne et je me vautre régulièrement, mais l’interlocuteur est patient. Il aide. Il comprend à demi-mot, rectifie avec bienveillance.

Et je me sens bien, délicieusement bien, avec mon Allemand de cuisine, qui me fait sonner comme un étranger cultivé plutôt que comme un touriste limité.
Car voyez-vous, les Anglais et autres Américains monoglottes (et les Anglosaxons qui liront ces lignes n’en prendront pas ombrage, puisqu’ils ne font pas partie de cette catégorie) ont un considérable désavantage: tout le monde les comprend. Rien de pire.
Aucune vie privée. Aucune conversation qui passe inaperçue. Remerciez Hollywood chaque jour, amis anglophones mais pas anglosaxons, de nous faire
découvrir tous les accents, tous les argots, toutes les expressions figées dans la tourbe, parce que dorénavant, nos maîtres sont bien sots, esclaves du premier porteur de bagage cinéphile qui peut détecter sans peine les intentions du touriste. L’Empire? Quelle blague! Conversez, même mal, dans la langue du pays, avec un autochtone, vous verrez si le prix est le même!
L’Anglais n’est plus une langue. Tout au plus un genre de canal sale, un ruisselet laid qui dessert à peu près tous  les égouts et collecte les eaux usées des cultures du monde. D’ailleurs vous l’avez remarqué: qui en a encore à faire de parler l’angliche?
Collez-donc ça fièrement sur votre cévé, petits enfants, et constatez: L’en faut une autre! Au moins une. Une vraie langue, pas le machin, là. L’anglais d’aéroport, de train, de tram, je ne sais.  Je suis un peu dur, là, sans doute, mais bon, mais c’est là mon expérience et elle vaut bien ce qu’elle vaut. Premièrement, si je résume: pourquoi passer pour un Anglais alors que ces mêmes Anglais nous prennent pour des buses? Deuxièmement: pourquoi passer pour un Anglais ou un touriste limité là où l’on peut gagner respect et amitié de l’autochtone? Troisièmement: Et puis qu’est-ce que c’est que cette langue sans subjonctif???

Ah, vous avouerez qu’en matière de jugements péremptoires et d’une mauvaise foi himalayenne, je ne crains pas grand monde. Mais comme dit un gars dans un
film: “ne me croyez pas, faites votre propre expérience, vos recherches...”

Bon, je vous laisse en vous économisant mon voyage de retour, vous diriez que je charge la mule: je ne vous parlerai pas de la vieille bique d’Outre-Manche qui fit du scandale pour me faire châtier d’oser abaisser le dossier de mon siège, ce qui, je suppose n’est pas autorisé, ou alors seulement pour les non-Français...

Vous ne me croiriez pas...

Mais j’ajoute quand même: Ô grand Cédric voyageur, c’est pas parce que je traîne mes guêtres dans le monde civilisé que je ne croise pas les pires sauvages.
Et quant aux autres, je rappelle que je ne suis toujours pas rémunéré pour la publicité éhontée que je fais à la maison Assimil...

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8 novembre 2004 1 08 /11 /novembre /2004 00:23

Et me revoilà, et cette fois en bonne compagnie. En décalé, aussi, puisque la compagnie s'en est allé. Il s'agissait de Madame Mère, alias Michèle, alias tous
les surnoms que vous voudrez y accoller, peu me chaut (et merci encore à vos corrections nombreuses quant à chaloir, j'ai brûlé mon Bescherelle il y a une vingtaine d'années, avec une joie païenne...
Savez-vous que je garde une bouteille de champagne au frais pour le jour où l'Académie Française sera abolie et ses membres pourchassés? Je ne sais pas, ça fait rire mes élèves. C'est pourtant vrai!)

Nous visitâmes donc. Un certain nombre de musées, faut l'avouer. Des beaux, d'ailleurs. Pleurez donc, amis et soupirants post-mortems de Frida! Sa maison vaut le détour, même le voyage. Et celle de Diego itou, puisqu'on en parle.

Mais je n'en parlerai pas. Eeeeh non. Pourquoi? Ouvrez donc un guide touristique, et le tour se jouera.
Mieux, videz vos tirelires et venez manger un taco avec Tonton Raphaël.

J'évoquerai quand même Xochimilco, sorte d'Hortillonages ensoleillés, avec moult mariachis, joueurs de toutes sortes d'instruments, vendeurs de toutes sortes d'aliments, photographes de toutes sortes d'instants, à condition d'aimer le sombrero brodé de fils d'or et la pose gringuienne. Qu'on se le dise: Xochimilco, son jardin flottant conservé pieusement depuis avant Cortès, reste un endroit rêvé
pour cuver une cuite, et passer un coup de vernis sur une gueule de bois fraîchement sculptée. Rien à faire que de flotter dans le calme qui se glisse entre les barques mariachiennes. S'arrêter pour acheter un colifichet ou un autre, une plante carnivore (authentique, je le fis), un cactus ou un taco. Tirer le portrait d'un adolescent malingre maniant une perche de quatre mètres pour faire glisser sa barque à fond plat ombragée et kitschement décorée. Et s'engloutir un épi de maïs assez nourrissant pour une famille de sacrificateurs azteques. Et tenir ainsi le temps d'une plongée dans le marché de Xochimiljenesaisplusquoi, endroit à la fois réalisant et dépassant la fiction traditionnelle de l'amateur de souk, qu'il l'ait rêvé ou connu. Des têtes de cochons côtoient des bouquets innombrables, tandis qu'un bébé dort dans un corbeille à même le sol aux côtés de son père, lui-même occupé à éplucher les feuilles de cactus qui rissoleront plus tard, peu avant d'atterrir dans une assiette posée sur le comptoir d'un marchand, et sous le nez d'un promeneur affamé, la boucle est bouclée merci et n'oubliez pas le guide. Une de ces ruches où le bruit, l'énergie dégagée par l'activité et le mouvement, réduisent de fait l'humain à une petite créature suractive et (presque! sans doute!) inlassable...

Pas vraiment envie de juger ou d'évaluer pourtant. Un jour peut-être, gagne-t-on la sagesse qui fait voir les pièces du puzzle comme une seule image, et comprend-on enfin tout, tout ce qu'on n'a qu'aperçu pendant la promenade, mais c'est vraiment pas sûr, voyez-vous. On verra à ce moment là, on a tous le temps.

Et croyez-vous qu'on fatigue Madame Mère comme ça?
Mais non, mais non...

Le même soir, direction Coyoacan. Oui oui oui, le fameux Coyoacan où l'on se paume, où l'on ne se retrouve pas, etc.... d'accord, c'est vrai, on s'était entraînés, j'avais reconnu le parcours. Pourquoi je vous raconte ça, moi... Ah, oui, parce que le Dia de muertos, nous le passâmes finalement là. Oh, on nous avait conseillé au bas mot dix destinations idéales pour assister à l'évènement, mais figurez-vous qu'une
destination située à une heure de route de la ville dans l'esprit du conseiller, je ne sais pas pourquoi, mais dans mes prévisions ça devient généralement trois ou quatre heures...

Alors bon, j'avoue, on a reculé, et on s'est "contentés" de Coyoacan.

Mais au fait, qu'y a-t-il à voir le jour des Morts au Mexique? Je ne vous dirai pas ce que l'on peut voir, ça c'est pour votre Lonuely Planet. Non, je peux vous dire ce qu'on a vu. Des offrandes. Le principe consiste à fêter la mort, et inviter les trépassés à revenir s'en jeter un derrière le suaire, plutôt que de se lamenter à coups de chrysanthèmes. Je ne critique pas, je constate. Ici, vous vous en doutiez
si vous ne le saviez pas, c'est donc la fête. La vraie grande fête à la Mexicaine, bière et tacos à volonté, gâteaux nourrissants (le Pan de Muerte, notamment, un
étouffe-chrétien, ce qui est de circonstance), musique, colifichets et calembredaines. Les offrandes, soit la nourriture déposée au pied d'autels richement décorés et généreusement enfumés d'un encens rugueux.
Les dessins de poussière, représentations de scènes morbides et souvent drôles, de squelettes à cheval, de photos de familles osseuses, de Pancho Villa maigrelets...
Alors, y croit-on ou y croit-on plus? Serait-ce encore un prétexte à fiesta, brame du "Viva Mexico" en sus?  Bon, oui, hein, bref... Y a de ça, et pas qu'un peu, foutre et diantre. Ces p'tits jeunes qui déambulent, ces couples férocement enlacés, ces familles qui se tiennent par la main, tout ce monde là traîne toujours à Coyoacan. Même moi, tiens, des fois. Juste moins nombreux, en somme. Ce soir, c'est bien le délire festivo-superstitieux. Ici et là, la vieille est convaincue. Elle époussète et donne la têtée macabre à son défunt, resté jeune sur papier glacé. Pas une larme, juste l'attente de le voir accepter l'invitation à casser une graine, le temps d'entrechoquer encore des molaires vraiment nues. On dit qu'on mange dans les cimetières. Les mâchoires craquent sur et sous terre, les cimetières dansent, les tombes s'ouvrent. Quand le monde est trop vide, on rouvre les portes de l'Hadès.
Et puis demain, on laissera sans doute se rendormir l'aïeul du sommeil du juste mort. On y pensera, et repensera encore, et on le réinvitera à la table familiale, le temps d'une photo de poudre sur le sol. 


Foin des Chrysanthèmes.

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25 octobre 2004 1 25 /10 /octobre /2004 00:18

Ok, il y a tromperie sur la marchandise.



Je n'ai pas gravi le Popocatepetl, et ne pourrai sans doute pas le faire avant longtemps. L'animal éructe depuis 10 ans, et interdit son accès à toute âme qui souhaite vivre. D'ailleurs, au cas où le message volcanique passerait mal, l'armée mexicaine (Je sais, ça fait toujours rire, mais pas quand on les fréquente) se charge de le rappeler, fusil en bandoulière: ici, on protège la nature. Le parc national est donc gardé par de la soldatesque. On lui donne dix pesos pour aller se promener, et tout va bien.

J'arrivai donc, tassé dans une voiture, audit parc.

Mais revenons en arrière, si vous le voulez bien, ou sautez les lignes suivantes si vous préférez.

Comment arrivai-je là-bas? Vous m'aviez laissé paumé au fin fond de Coyoacan, pestant et vociférant comme aux plus beaux jours, avec sans doute dans l'idée qu'à
ce compte-là, mes projets montagnards tourneraient en eau de mezcal, et que je finirais par me résigner à téter goulument le gasoil de Mexico. Eh bien non.
Profitant de la perspective d'une semaine de presque-vacances, j'avais focalisé l'objectif: la montagne ou la mort, rien de moins. Eh oui, on ne peut pas me narguer à longueur de semaine en apparaîssant de temps en temps, au gré du smog, depuis deux moins, sans que j'envisage une réaction.
Je fis donc ce que tout être humain sensé peut faire à Mexico, la ville dont on ne risque pas de sortir sans moyen de locomotion (cette ville s'arrête-t-elle quelque part, au fait?), je fouinai et écumai Internet en quête d'un guide, d'un montagnard, d'un groupe, d'un compagnon de cordée, d'une secte d'adorateurs des volcans, peu m'importait, peu me challait (Pas sûr du tout de la conjugaison de cette antiquité grammaticale).
Et je trouvai!
Un groupe, une bande, un genre de gang familial, du genre à sortir avec un genre de guide dans leur genre de montagnes. Et les voilà qui m'invitent!
Moi, ni une ni deux, j'accepte avec enthousiasme. "une promenade de cinq heures, du côté de l'Iztaccihuatl, et les conditions physiques sont inégales". Chez moi, ça ressemble fort à une promenade apéritive ou digestive. Du coup, j'embarquai le malheureux Rodrigo, joyeux camarade de la Mésalliance Française.

Nous arrivons donc (je repasse au présent, on va laisser le passé simple reposer en paix) dans le parc national, avec vue sur le décolleté très plongeant du Popocatepetl, et ses fumerolles discrètes mais indiscutables. Photos. Admiration. Exaltation.



Et on continue de monter, toujours en voiture. Ah que c'est bon d'avoir frais! A 4000 mètres, enfin arrêtés, je savoure le froid matinal en short et en t-shirt (Je me suis allégé d'un pull en pensant, finement, que la balade allait se cantonner au fond de vallée. Non seulement je me suis trompé, mais ça semble commencer de congeler Rodrigo, Argentin hélas déshabitué du froid, qui s'est inspiré de ma tenue.). LEs Mexicains de l'entour, tous vestepolarisés, et déclarant que le nez commence à leur geler, me regardent avec un mélange d'inquiétude, d'appréhension et de doute (les
premiers pour les vieux et les filles, le dernier pour les jeunes mâles, décidément tous les mêmes par ici: méfiants, machos et pas très heureux de la concurrence européenne. Un haussement d'épaules suffit généralement). Logiquement, je devrais m'écrouler bientôt, tout de bleu et de givre.
Eh bien non! Ici, à 4000m, on trouve encore des forêts, des prairies et des vaches qui paîssent. Pourquoi pas un français qui résiste au froid, quand ce dernier n'est que d'une quinzaine d degrés? Faut quand même pas oublier que mes nouveaux compatriotes (je parle des mexicains), sortent le matin avec des gants par un bon vingt degrés! Que les fabricants d'anoraks font fortune! Excusez-moi donc si je joue
aux durs, mais faut quand même rester réaliste: rien qu'en passant plus d'un quart de siècle dans notre bonne Picardie, je ne risque pas les engelures.

La balade eut donc lieu, et je ne vais pas vous assommer de détails, ceux qui firent rebrousser chemin à Rodrigo, épuisé par le manque d'entraînement et la cigarette superfétatoire, ceux qui virent le groupe se distendre dans la progression, parce que même pour un Mexicain, au-dessus de 4000 on manque d'air, ni même ceux qui me virent arriver triomphalement en haut, non pas de l'Iztaccihuatl, enneigé et demandant quelque équipement, mais du point culminant de la promenade, à hauteur de Mont-Blanc, entre 4800 et 4900m. En short, toujours. Je courus même quelques dizaines de mètres pour aller prendre quelques photos, à ma propre et considérable surprise. LEs compagnons de marche arrivèrent après moi (les petits jeunes un peu méfiants, savez, les mâles...), et pas frais pour ce qui était du dernier, premier au départ, du genre à courir loin devant... Un peu de fierté pour le vieux, donc, je suis en pleine forme. Et à la redescente aussi, puisque je retrouvai l'ami Rodrigo, lessivé d'une sieste fatale au soleil et de quelques roulés-boulés dans les chardons. Je suis sûr qu'il reviendra...

Sachez seulement que veni, vidi et plutôt vici, et bien content en plus. Cet Iztaccihuatl m'a fait seulement saliver: il est surnommé la Mujer Durmida, la femme endormie, et figure de loin une silhouette allongée sur le dos. Imaginez-vous que les
"classiques" consistent à en escalader les genoux, le ventre, les seins ou la tête... Ah c'est quelque chose! Là, je ne m'en suis qu'à peine approché, en vulgaire voyeur!

Je ne m'étendrai pas plus sur les interprétations géographiques et topographiques, mais apprenez tout de même en passant que cette femme est supposée en attente d'un guerrier, qui n'est autre que le Popocatepetl voisin (et pas moi, apparemment!)...

Autant vous dire que j'ai bien dormi, ce soir-là...

Raphaël

PS: je ferai passer quelques photos aux possesseurs d'adresses Yahoo!, parce qu'ils disposent d'un volume important pour les recevoir, ainsi qu'aux Wanadooistes
et quelques autres. Pour les malheureux amateurs de Hotmail, faites-moi savoir vos desiderata, et faites de la place dans vos archives si vous souhaitez recevoir un portrait pas dédicacé du héros du jour, sur fond de Popocatepetl ou d'Iztaccihuatl. Inutile de joindre une enveloppe timbrée à votre mail. Bises unitaires.

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12 octobre 2004 2 12 /10 /octobre /2004 00:14

Alors oui, je sais, ce titre, pour les quelques connaisseurs, en aura choqué plus d'un.

Coyoacan, qu'est-ce donc?
Mais le berceau de Frida, bien sûr. Le quartier (la colonie, ici, hein, souvenez-vous) par excellence, après le centre historique. Le centre historique, c'est la tournée des musées, les fresques de Rivera et compagnie, et le musée d'anthropologie, bref, tout ça, vous le trouverez dans le premier routard venu, je parle du guide, pas d'un vrai routard.

Mais Coyoacan, c'est le must. Euh, qu'est-ce que j'écris, moi? Lo mejor. Voilà, c'est ça.

L'un des plus anciens quartiers de la ville. Vous aimez les maisons peintes de couleurs vives, avec des patios somptueux, des jardins verts, des cactus, des palmiers, et un petit mur de vieille pierre pour entourer tout ça? Eh ben vous serez servis. Si vous pouvez jeter un regard au travers des grilles blindées surplombées de barbelés, parfois électrifiés d'ailleurs (délicieux clic clic annonciateur d'un barbecue de truand imprudent). Vous apprécierez également des porches imposants, décorés parfois à l'Aztèque.

Le Mexicain de Mexico aime Coyoacan. Il s'y promène en famille, sur les deux ou trois places toujours bondées de micro-commerçants, vendant des cuireries ou des
chips à la vinaigrette (sic...et beurk...), histoire de faire faire un tour de manège au marmots (des manèges taille marmots. Pas plus de cinq mètres de haut pour la grande roue, avouez que c'est tentant...). Et puis on y entend de la musique à tous
les coins de rue, c'est toujours sympathique, enfin ça dépend du moment, de l'humeur, mais bon, le Mexicain de Mexico, lui, il aime ça, le mélange entre le dernier groupe ricano-gringo et les mariachis qui sérénadent pour le restau d'à côté. 
Faut dire aussi que Coyoacan, c'est le genre d'endroit où on peut trouver un petit bar ou un restaurant au milieu d'une de ces cours intérieures toutes calmes, sous la fraîcheur d'un balcon de l'époque coloniale... Ah oui, quand même... On y entend déja moins les trompettes mariachiennes, on peut même y discuter benoîtement...

Coyoacan comprend par ailleurs au moins deux librairies-cafés, le genre d'endroit de rêve qui donnera du mal aux Amiénois pour me donner des regrets... Quoique, dans un autre genre, le Fetiche, rue des Jacobins... Non, pas de regrets.

Y en a encore? Y en a encore. Coyoacan (Essayez de me lire en entendant ma voix de doubleur de télé mexicaine, mélange suave de Connaissance du Monde et du pas regretté Daniel Bilalian), Coyoacan donc, est également la colonie qui abrite en ses bras de verdure les musées Trotski et Frida Kahlo... C'est à dire la maison de Frida, entre autres. La vraie. Et la maison dans laquelle Trotski gagna un peu d'aération cranienne par voie d'alpinisme. Telle quelle. En l'état. Ah oui, quand même... 


Alors, pourquoi Maldito? Pourquoi maudire ces statues de coyotes flanquées de jets d'eau, dominant majestueusement quelques indiens dansant rituellement pour quelques sous? Pourquoi pester, pester encore contre ce merveilleux paradis, celui de quiconque s'est déja rôti au soleil du Centro Historico?

Mais parce qu'il est fait n'importe comment, voilà pourquoi! Parce que je m'y perds à chaque fois, caramba!! Parce qu'il est inutile de donner un rendez-vous dans ce labyrinthe de rues déglinguées qui se croisent trois fois entre elles à angle aigü ou
obtus avant de revenir sur leurs pas, numérotées à la va-comme-je-te-pousse-le-verre-de-mezcal, et qu'on a beau viser la fameuse église, la seule ou presque, celle qu'on ne peut ni ne doit louper, on se te me la loupe! A tous les coups.

Je retournerai donc à Coyoacan, mais sans objectif précis, sans heure, sans but, et sans carte non plus (à quoi bon? le cadastre doit être fait à la toulousaine...). J'irai, les poings dans mes poches crevées, à l'heure où blanchit le smog, puisque de
toutes façons il n'y a rien d'autre à faire là-bas que se perdre...

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4 octobre 2004 1 04 /10 /octobre /2004 19:01

Allons-y.

J'ai donc emménagé. Déménagé du temporaire appartement de l'Alliance pour une piaule sur un toit. Non, pas sur un toit de tôle odulée au fond d'un barrio rouillé, poussiéreux eet animé par les hurlements des chiens de combats. Dans un quartier calme, paisible, et sur un toit qui est une terrasse. Donc tout va bien, pas vrai?

Comme je le répète à l'envi ici, les bons côtés sont excellents. Indépendance totale, les propriétaires (une dame et son grand, grand, grand fils) sont apparemment trop frileux pour profiter de leur terrasse. Tant pis pour eux, j'ai maintenant mon terrain de jeux. Les palmiers en vue bruissent dans le ciel nocturne, les immeubles se découpent sur les nuages. Les avions vrombissent en me survolant...

Oui, vous avez bien lu. Les avions, ceux qui passent à se racler le ventre sur les gratte-ciels trapus de Mexico pour aller atterrir quasiment sur la place du Zocalo, en plein centre ville.
Et c'est le luxe, ça? Ben... oui. Chaque avion qui me beugle aux oreilles me rappelle celui que je pris et ceux que je prendrai, donc... Un soupçon de romantisme dans le kérosène, et la machine redémarre.

Les mauvais côtés se découvrent toujours après, c'est bien connu. Pour l'instant, ils ne sont pas désastreux. Loin de là, ma position sommitale (dans la maison, donc) m'epargnant tout contact avec le reste de la maisonnée si je le souhaite.  Mais bien sûr, foin des tergiversations, je vous le livre: ma propriétaire est... une propriétaire. Une vraie, du genre qui habite les lieux. Extrêmement sympathique, prévenante, attentivissime à mon bien-être... Et au bon respect des règles de son foyer. Et là, évidemment, ça se gâte toujours. Car, je devais m'être sculpté une belle gueule de bois pour ne pas avoir vu ces effarants quolifichets religieux qui ornent à peu près tous les murs. Vingt Dieux de mes Aïeux! le Christ en authentique ferraille peinte et l'image pieuse scabreuse qui l'accompagnait sur mon mur ont vite été porter leur croix au fond du placard, vous vous en doutez.  Mon Golgotha ne recevra pas de visites scandaleuses, donc. Damned! Adieu la garçonnière, bonjour le séminaire! Toutefois, Javier,autre locataire, vénézuélien élevé au Canada (le tournis de la mappemonde. Il a donc choisi le juste milieu ou peu s'en faut), invite sa gentille fiancée jusque dans son sanctuaire, lui! Oui mais lui, ça fait bien longtemps qu'il est avec cette jeune fille etc...  Idem du téléphone, qui ne marche que dans un sens pour moi: pour appeler, je garde une griffe jalouse et aiguisée sur celui de l'Alliance. Mais pour recevoir, vous pouvez vider vos comptes en banque sans retenue, je vous ferai passer le numéro un de ces jours.

Le plus cocasse date d'hier soir. Bon, la señora a bien compris que le coup de rouvrir la fenêtre de salle de bains que j'avais dûment fermée, ça m'avait un peu fâché. Du coup, elle rampe en toutes circonstances.
Et de me réexpliquer pour la millième fois déjà pourquoi, comment, quand et diable sait quoi d'autre, elle avait mis son règlement au point. J'écoute, patiemment, souriamment, etcemment. Puis je lui dis, avec un de ces grands rires discrets que vous me connaissez, que ses règles ne me posent aucun problème! Aucun Ningun!
Ah?! vous dites vous, mes bons amis? Mais que, quoi?
C'est pas lui, ça!  Mais si. Car j'ajoute dans le même rire: "ne t'inquiète pas (ici on tutoie tout le monde), si tes règles, pour une raison ou pour une autre, ne me conviennent plus, je partirai!"


Eh ben les amis, l'effet ne se fit pas attendre.
Décomposition faciale à peine contrôlée, elle me redit (encore.....) que l'essentiel pour elle est que je me sente bien et tralala. Aucun problème lui dis-je, puisque si ça ne me plaît plus je décampe en moins de trente secondes.  Voilà la clef, livrée un cheveu (celui qui n'atterrit pas dans la soupe que je faisais chauffer en même temps)plus tard. C'est que voyez-vous, je suis une aubaine. Parce que la brave dame, eh ben elle tire le Diable par la queue (je m'abstiens de tout commentaire égrillard mais maintiens néanmoins mon expession)!
Qu'elle a failli la vendre, sa bicoque! Et que sans la location de trois chambres, c'est la soupe populaire qui n'existe pas ici! Et que je serais son "angel de la guardia" si je lui trouvais un autre locataire!
Pour la piaule qui reste désespérément vide... Et moi de continuer à rire devant ses comparaisons religieuses... Dorothy Haze a pris du plomb dans l'aile, elle bosse dans une banque et sa Lolita s'appelle Hugo, mesure 1,90 et fume comme un pompier.  Quant à l'Humbert Humbert que je suis, laissez-moi vous dire qu'il ne serait pas surpris de voir les règles s'assouplir, des fois qu'il souhaite changer de mode de vie, et donc de turne... (pour les allusions de ce paragraphe, reportez-vous à Lolita, chef d'oeuvre de Nabokov, ou à sa version Kubrickienne: la séquence de visite de la maison Haze devrait vous enchanter.)

J'ai bien ri. J'en ris encore. Voilà ce que c'est que de traiter un mois de caution (mexicain, je l'admets) par le mépris. Voilà que d'un coup, la hache se dote d'un second tranchant. Et voilà surtout que le propriétaire, par nature retors et fourbe, se prend à trembler. "Dis-moi Raphaël, quel est ton point de vue? Pourquoi certaines personnes ne reviennent pas après la visite?" Tu veux la réponse? Hmmmm? Non, je me la garde, j'en ris trop.

Sur ce, cher amis, je vous laisse déguster la vue que j'avais depuis l'appartement précedent et temporaire. Pas vilain ma foi. Faudra bien que j'arrive à grimper un de ces sommets, nom de d'là!


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